Echos de la Butte Rouge n° 6

Sommaire

Editorial

Les graines du futur

C’est à partir de ce qui est déjà là qu’on peut inventer l’avenir, en laissant pousser les bonnes graines, en cultivant le jardin du vivre ensemble, que ce soit dans des jardins familiaux, des espaces communs, une communauté ouverte et vivante. La société, elle aussi, est un écosystème dans lequel certaines et certains jouent un rôle pionnier, comme ces arbustes qui colonisent les friches, ils voient plus loin que leurs contemporains et sèment ce qui fera vivre les générations futures.

Dans ce qui suit, vous verrez ce que fait la nature pour se régénérer mais aussi comment le tissu social lui aussi se régénère sous l’impulsion de certains êtres, tels Marie Bonnevial, une femme hors pair qui, par sa force de caractère et la vision de ce qu’elle espérait pour l’être humain, a permis d’ouvrir la voie.

Régénération

Le végétal est omniprésent dans la cité-jardin de la Butte Rouge. Il nous offre une belle leçon de régénération pour penser une réhabilitation écologique de cet ensemble hors du commun. En l’absence d’entretien digne de ce nom, les bâtiments se dégradent, tandis que la nature se bonifie. Certains jardins laissés en friche ont repris le chemin de la succession naturelle. Le sol s’habille de plantes couvre-sol. L’herbe laisse la place à des arbustes. La ronce joue son rôle de protectrice des jeunes arbres. Le couvert forestier regagne du terrain.

Dans certaines parties de la Butte, nous assistons ainsi à la naissance de ce que le célèbre paysagiste Gilles Clément nomme un « tiers-paysage », soit un paysage né de l’abandon. La nature est résilience, son élan vital ne peut être anéanti. Pour lui redonner une dimension agréable aux yeux des humains, il suffit de révéler le dessin esquissé par les plantes, de jardiner avec la nature plutôt que de projeter sur elle une image de désordre pour mieux fuir ses responsabilités dans la négligence d’un lieu.

Pour la réhabilitation des bâtiments de la Butte Rouge, un seul choix se justifie à l’heure du dérèglement du climat : faire avec l’existant en le régénérant. Pensée comme une forêt ouverte dans la continuité du bois de Verrières, la cité-jardin est son meilleur guide pour garantir son propre devenir. Les voies de circulation, l’implantation des bâtiments et les pelouses épousent le relief accidenté du terrain comme nulle part ailleurs. Ses îlots de verdure imitent le sous-bois. Ses ouvertures sont autant de clairières, tandis que ses bâtiments s’érigent tels des arbres remarquables, sans démesure. La Butte Rouge est en avance sur son temps. Elle préfigure la ville de demain. La Butte Rouge est une « cité-jardin » depuis les années 30, pas un  « éco-quartier » à sortir prochainement de terre avec ses « espaces verts » comme un décor. « Quelle chance pour nous, « enfants de prolos », de pouvoir profiter de cet environnement. (…) Ma mère et mon père nous ont transmis, à ma sœur et moi, ces valeurs de vivre ensemble à l’intérieur d’une cité bigarrée et, malgré que nos chemins se soient éloignés de la Butte, j’ai transmis à ma fille » témoigne Jean-François. La cité reste vivante bien au-delà de ses limites. Elle a déjà planté ses graines pour les générations à venir.

Marie Bonnevial

Marie Bonnevial, institutrice pionnière en matière d’idées politiques et de droit des femmes, au XIXe siècle, a donné son nom à une rue de la Butte Rouge située juste derrière la place Jean-Allemane. « Comment ne pas imaginer un hasard voulu, c’est dans la rue Marie-Bonnevial que se trouve l’école Thomas-Masaryk ! » se réjouit une ancienne habitante. 

Née en 1841 et morte en 1918 à Paris, Marie fut d’abord une femme courageuse et visionnaire et une ardente militante socialiste. Ayant elle-même fait l’expérience de la pauvreté et de la violence sociale, elle développa une conscience aigüe de la condition ouvrière, en particulier celle des femmes. Ce qui l’amena à fonder les premiers syndicats féminins pour œuvrer à l’amélioration de leur sort. Elle fonda notamment le premier syndicat féminin de l’enseignement.

Elle trouva, grâce à son métier qui lui avait insufflé la connaissance du passé, la force de croire en un avenir plus juste. Sa force de caractère et sa conviction lui donnèrent l’énergie de lutter pour un idéal ancré dans le réel, et de le transmettre. Imaginer et avoir foi dans le bien commun, ainsi peut-on engendrer un projet de société auquel toutes et tous ont envie de contribuer. On retrouve là l’idée qui a présidé à la conception de la cité-jardin telle que l’a rêvée et concrétisée Henri Sellier, un idéal de justice sociale ancré dans un lieu et dans une architecture avec des caractéristiques particulières.

Régénérer la cité-jardin historique de la Butte Rouge, c’est aussi renouveler cette foi dans le bien commun. Quand Marie fut condamnée à l’interdiction absolue d’exercer sa profession d’institutrice du  primaire pour avoir exclu de son programme l’instruction religieuse, Victor Hugo, lui écrit dans une lettre datée du 17 septembre 1873 : « Mademoiselle, la réaction vous frappe, là-bas à coup d’épingle, ici à coup de massue. Continuez l’œuvre sainte. Restez la patience sans la faiblesse, la résignation sans l’abaissement. Tous les honnêtes gens vous admirent : moi je vous bénis » [1]

[1] Ligue française pour le droit des femmes, 

    Cinquante-ans de féminisme [archive], Paris, 1921

Actualités

Salon International du Patrimoine Culturel

La Butte Rouge était présente à ce salon qui s’est tenu à Paris du 24 au 27 octobre, des représentants de l’A.C.P.E. et de Sauvons la Butte Rouge ont pu s’entretenir avec des représentants du Ministère de la Culture.

L’avenir de la Butte Rouge se joue désormais au Conseil d’État

Le classement au rabais de la Butte Rouge à Châtenay-Malabry permettra de détruire 50% de la Cité-jardin, tout en ne protégeant que partiellement les 50% restants : des associations locales et nationales ont déposé un recours au Conseil d’État contre un arrêté de classement partiel en Site Patrimonial Remarquable (SPR) promulgué par Madame Rachida Dati.

Communiqué de presse du 20 août 2024

Bonus

Voyages (extra)ordinaires

Au cours d’une résidence artistique en milieu scolaire, la Maison de Chateaubriand et le musée départemental Albert-Kahn se sont associés à la photographe Andrea Eichenberger et à l’écrivain Marc Wiltz afin d’embarquer les jeunes de Châtenay-Malabry et de Boulogne-Billancourt dans ces voyages (extra)ordinaires.

Ainsi près de deux cents jeunes ont été invités au cours d’une série d’ateliers à associer travail d’écriture et prises de vue photographiques pour former leur propre carnet de voyage, mêlant images et témoignages sur leur environnement quotidien. Nous vous invitons à ces « Voyages (extra)ordinaires ».

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